Comment choisir ses produits alimentaires ? – Le point sur les labels

Hello tout le monde ! Je fais suite ici à ma chronique sur France Bleu Alsace de mardi dernier et dans laquelle j’évoquais brièvement la question des labels alimentaires. Vaste sujet, souvent cacophonique et dont j’avais envie d’éclaircir quelques points prioritaires.

Vous le savez maintenant, pour savoir ce que contient vraiment votre assiette, je vous conseillerai toujours d’aller en priorité vous approvisionner, en direct, chez vos « petits » producteurs locaux (le mot « petit » n’est pas utilisé ici par hasard, je n’inclue pas là-dedans les pourfendeurs d’une agriculture et d’un élevage intensifs et à destination industrielle ou de grande surface). Observer leur travail, leur poser des questions sur leurs pratiques, leur manière de voir les choses, leur engagement pour l’environnement est selon moi la manière la plus sûre de savoir ce que contient réellement votre assiette.

Mais, évidemment, ce n’est ni la plus simple, ni la plus évidente à mettre en œuvre au quotidien. Passer par des distributeurs peut s’avérer beaucoup plus pratique pour la plus grande partie d’entre-nous (magasins ou épiceries bio et spécialisés, la Ruche qui dit oui, ou encore les supermarchés – que je ne fréquente plus personnellement). Pour s’y retrouver, il faut savoir lire les étiquettes et de petits logos peuvent nous aider à y voir plus clair. Savoir ce que contiennent réellement les produits que l’on va consommer (et ingérer, ce n’est pas anodin), et la manière dont ils sont produits a une importance capitale si l’on se soucie de l’environnement et des humains. Je vais donc essayer de faire le point avec vous et de démêler un peu tout ça.

Je précise que pour rédiger cet article, je me suis beaucoup inspirée des infos récoltées dans le guide ID Pratiques de l’ID Info Durable (avril-juin 2020). Un petit guide pratique que je vous conseille d’ailleurs vivement.

Pour bien comprendre de quoi il s’agit, il faut d’abord comprendre ce qu’est un « label ».

Il s’agit d’une marque ou d’une étiquette que l’on attribue à un produit ou à une production complète répondant parfaitement à un cahier des charges précis et plus ou moins sévère. Les labels peuvent être reconnus à différentes échelles : mondiale, européenne, française … et permettent de valoriser la qualité d’un produit ou d’une production.

Il existe des labels publics (gérés en France par l’INAO – Institut national de l’origine et de la qualité) comme par exemple le Label rouge qui est détenu aujourd’hui par le ministère de l’agriculture français, les AOC et AOP (gérées par l’Union européenne) ou encore le label AB de l’agriculture biologique française ; mais aussi des labels privés (que l’on va plutôt qualifier de « marques ») créés par des syndicats professionnels, des entreprises ou des associations dans le but de promouvoir certaines formes d’agriculture ou de production agro-alimentaire – c’est le cas par exemple de la marque Demeter qui promeut aujourd’hui la biodynamie. Attention, il n’y a rien de négatif à mon sens à ce qu’un label ou une marque soient privés. Evidemment, il y a toujours un risque qu’elle soit affiliée à une industrie, ou à un type de production particulier, mais, le fait qu’elle soit privée peut aussi garantir son indépendance politique, ce qui est un atout. Il y a de tout, du bon, et du mauvais dans chacun des deux cas. Et je vais essayer ici de vous éclairer un peu.

Ce qu’il faut également savoir sur les labels alimentaires, c’est que la plupart, si ce n’est tous, sont payants pour les producteurs (ou les associations qui les soutiennent). Cela peut paraitre étonnant ou aberrant, mais c’est en fait tout à fait normal puisque la gestion de ces marques ou labels nécessite des frais de fonctionnement inévitables, comme dans toute entreprise ou service (création du cahier des charges, contrôles, communication, charges salariales, énergétiques, locatives etc.). Le problème, c’est que tous les producteurs n’ont pas les moyens d’y accéder, ce qui crée parfois une concurrence et une forme d’inégalité de visibilité entre eux (d’où l’importance de se renseigner directement auprès de ses petits producteurs locaux et de ne pas tomber dans une forme d’agribashing systématique). J’avais besoin de le préciser avant de démêler tout ça avec vous.

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Comment s’y retrouver et à quoi correspondent tous ces labels ?

C’est là tout le nœud du problème tant il s’agit d’un micmac infernal. On peut trier les labels et marques alimentaires selon 3 grandes grandes catégories (il existe évidemment d’autres catégories de labels, mais je n’évoque ici que celles qui comptent vraiment à mes yeux. C’est un choix personnel.) :

Les appellations géographiques et qualitatives :

Il s’agit ici de labels permettant de protéger et d’identifier des savoirs faire précis et géographiquement localisés. Ils sont à la fois un gage de qualité mais permettent aussi d’empêcher les « contrefaçons ». Ces appellations sont très utiles lorsque l’on cherche à manger local. En revanche, le cahier des charges n’est pas contraignant quant à l’utilisation de produits phytosanitaires chimiques dans les exploitations agricoles. Ce sont des labels de qualité qui protègent surtout les producteurs mais à mon sens, non-suffisants en terme de santé et d’environnement. Ils doivent être complétés par d’autres macarons.

L’Appellation d’origine protégée (AOP) désigne un produit dont toutes les étapes de production sont réalisées selon un savoir-faire reconnu dans une même aire géographique, qui donne ses caractéristiques au produit. C’est un signe européen qui protège le nom du produit dans toute l’Union européenne.

L’Appellation d’origine contrôlée (AOC) désigne des produits répondant aux critères de l’AOP et protège la dénomination sur le territoire français. C’est la notion de terroir qui fonde le concept des Appellations d’origine.

La marque Savourez l’Alsace garantit que les produits, qu’ils soient bruts ou transformés ont été confectionnés en Alsace. Il garantit également que les entrepreneurs concernés investissent en Alsace. Pour adhérer à la démarche, les professionnels doivent proposer des produits bruts 100% alsaciens, ou des produits transformés en Alsace avec au minimum 80% de matière première alsacienne. Pour respecter cette transparence, les producteurs et transformateurs s’engagent à être contrôlés régulièrement par un organisme indépendant.

Le Label Rouge est un signe national qui désigne des produits qui, par leurs conditions de production ou de fabrication, ont un niveau de qualité supérieur par rapport aux autres produits similaires habituellement commercialisés. Les produits qui peuvent bénéficier d’un Label Rouge sont les denrées alimentaires et les produits agricoles non alimentaires et non transformés. Le Label Rouge est ouvert à tous les produits, quelle que soit leur origine géographique (y compris hors de l’Union européenne). Attention, les critères restent assez larges et très différenciés selon le type de denrées. Ils renvoient surtout à la qualité gustative et au mode de production. Ils ne sont donc pour moi pas non-plus suffisants en terme d’environnement.

L’agriculture biologique :

Vous connaissez maintenant ma position sur le sujet. Pour moi la seule agriculture qui vaille la peine d’être mise en avant est l’agriculture biologique, et surtout biodynamique, la seule à protéger à la fois la terre, l’environnement, la biodiversité et notre santé. Mais attention, il existe de nombreux labels différents pour l’agriculture biologique et tous ne répondent évidemment pas aux mêmes cahiers des charges ni aux mêmes exigences. Il faut également savoir que les labels européens et français ne sont malheureusement pas toujours suffisants et peuvent cacher d’autres réalités (sociales, environnementales – pensez aux tomates bio cultivées sous serres chauffées au fioul ….). Heureusement, il existe d’autres labels pour compléter ces manquements.

Le logo européen, aussi appelé « Eurofeuille », permet aux consommateurs de repérer les produits issus de l’agriculture biologique. Sa présence sur l’étiquetage assure le respect du règlement relatif à la production biologique de l’Union européenne. Il garantit l’interdiction d’engrais et de pesticides de synthèse dans les productions et certifie que 95% des composants d’un produit sont issus de l’agriculture biologique respectant les normes de l’UE.

La marque AB est propriété du ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation. Elle identifie les produits d’origine agricole destinés à l’alimentation humaine ou animale qui respectent la réglementation et le contrôle tels qu’ils sont appliqués en France. Les conditions d’usage de cette marques sont contrôlées par l’Agence bio, groupement d’intérêt public sous tutelle du ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation. Le logo AB peut être utilisé facultativement, en complément du logo européen. Contrairement aux idées reçues, il n’y a donc pas de grande différence entre ces deux labels, si ce n’est que le logo AB se retrouve sur des produits cultivés, ou assemblés en France. Attention, assemblés, ne veut pas dire que toutes les matières premières qui y sont intégrées sont françaises.

Ce petit logo orange est de plus en plus présent sur nos produits. Et pour cause, Demeter est le chantre de la biodynamie, une pratique agricole qui pour le coup est véritablement respectueuse de l’environnement et de la terre. Certains y voient encore à tort une idéologie loufoque et spirituelle, mais il s’agit bien de pratiques concrètes, aux résultats scientifiques avérés. Sa démarche cyclique, permet entre-autre de rendre à la terre ce qu’elle nous a donné tout en la respectant scrupuleusement. On y trouve notamment les pratiques de permaculture (mais pas seulement) qui ont le vent en poupe actuellement. La saisonnalité des produits, les circuits courts mais aussi le bien-être animal ont une place de choix dans ce type de production qui a l’avenir devant elle.

Nature et progrès est un autre label encore trop méconnu et qui complète pourtant parfaitement celui de l’agriculture biologique. Il assure en effet que des produits certifiés bio ne contiennent ni huile de palme, ni colorants, ni parfums, ni antioxydants (et la liste des contrindications est encore longue). Du bio, oui, mais pas n’importe comment, et ça, ça compte réellement. Cette marque intervient également dans la gestion des entreprises et vérifie que celles-ci sont également respectueuses de l’environnement (gestion des déchets, produits ménagers …). Elle s’assure enfin que l’alimentation animale est biologique.

Bio Cohérence prend en compte les distances mais également la dimension sociale de l’agriculture biologique. Le consommateur ne doit pas se trouver à plus de 80 km du producteur, et des critères liés aux conditions salariales des producteurs doivent être assurés. On est ici dans une véritable logique de développement durable qui valorise le respect de la biodiversité et de l’environnement, l’emprunte carbone et la redistribution des richesses (dimension éthique souvent négligée).

Le commerce équitable :

Autre domaine auquel il faut penser lorsqu’on revoit un peu la composition de nos assiettes, c’est la question de « QUI produit notre nourriture ? ». La notion de commerce équitable désigne un commerce juste et respectueux des humains qui en sont à l’origine :

« Le commerce équitable est un partenariat commercial fondé sur le dialogue, la transparence et le respect, dont l’objectif est de parvenir à une plus grande équité dans le commerce mondial. Il contribue au développement durable en offrant de meilleures conditions commerciales et en garantissant les droits des producteurs et des travailleurs marginalisés, en particulier ceux du Sud. Les organisations du commerce équitable, soutenues par de nombreux consommateurs, s’engagent activement à soutenir les producteurs, à sensibiliser l’opinion publique et à mener campagne pour favoriser des changements dans les règles et les pratiques du commerce international conventionnel. »

Artisans du monde

Le commerce équitable peut s’appliquer à tous les producteurs à partir du moment où ceux-ci perçoivent une rémunération juste et que les intermédiaires sont les plus limités possibles. L’objectif de ce commerce est d’assurer le développement économique, social et environnemental de toutes les régions agricoles du monde. Manger du chocolat récolté par des enfants payés 1 € par mois n’a aucun sens … Les labels de commerce équitable sont donc importants, et s’appliquent même aux productions françaises. S’assurer que les producteurs sont correctement rémunérés est un acte citoyen et solidaire.

Il s’agit justement d’un label de commerce équitable 100% français. Agri-éthique aide les producteurs à fixer leurs prix en fonction de leurs coûts de production et leur garantit une rémunération juste.

Logo bien connu, le label Fairtrade Max Havelaar est international et contribue concrètement au développement de pratiques agricoles et durables à travers le monde. Son cahier des charges s’adapte évidemment aux pays et aux moyens de production. Il permet une rémunération minimale aux producteurs et lutte également contre le travail des enfants dans les plantations.

Fair’n Green est un label que l’on retrouve essentiellement dans la viticulture. Je vous en reparlerai bientôt puisque j’ai un article sur le thème encore dans mes brouillons. Il comprend les domaines de la gestion, la protection de l’environnement et la participation communautaire. Il promeut une viticulture durable et socialement responsable.

Fair for life est un label qui concilie agriculture respectueuse de l’environnement et équitable. Il assure un prix et un salaire minimum pour les producteurs et exploitants agricoles. Il ne concerne pas uniquement l’agriculture biologique mais l’encourage vivement.

Sans doute le plus complet des labels équitables, Bio partenaire concilie des valeurs sociales fortes à l’agriculture biologique. Ses critères sont très strictes, impliquant un contrôle à chaque étape de fabrication. Il développe également des programmes de développement économique et social en lien avec les producteurs et les régions de production afin d’avoir un impact plus large et important.

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Quels labels privilégier ?

Ces labels nous permettent donc, et dans une certaine mesure évidemment, de savoir de manière plus ou moins précise comment ont été fabriqués nos aliments et ce qu’ils contiennent. Mais vous l’avez vu, ils restent incomplets. L’agriculture biologique oui, mais pas hors saison .. Le commerce équitable oui, mais pas en agriculture intensive … Leur problème, c’est qu’ils manquent pour beaucoup de lisibilité. Manger bio c’est bien, mais quel bio ? Pas celui contenant de l’huile de palme ou des parfums de sythèse. Bref, voici comment je procède pour faire le tri et choisir au mieux (ce n’est pas toujours simple).

  • Je priorise absolument l’agriculture bio et locale. Ainsi, en connaissant mes producteurs, je sais aussi maîtriser mon bilan carbone et leur rémunération. Elle est là la logique la plus durable (économique, écologique et éthique).
  • Les produits Demeter ont toujours ma préférence sur tous les autres. Je suis convaincue que n’importe quel producteur opérant en biodynamie est un écologiste activiste, un extrémiste du circuit court et un véritable protecteur de la biodiversité et de l’environnement. S’il y a bien une marque à laquelle on peut faire confiance, en raison aussi de son indépendance politique, c’est celle-là.
  • Le bio plutôt que l’équitable ? La question reste très difficile à trancher. Du bio français oui, européen pourquoi pas (seulement dans certaines conditions), mais du bio en provenance de l’autre bout du monde sans garantie d’équitabilité, beaucoup moins … Rappelons nous toujours que derrière chaque achat, qu’il soit alimentaire ou non d’ailleurs, il y a des humains, des personnes qui travaillent dans des conditions plus ou moins acceptables. Alors si l’on trouve des produits labélisés Bio Partenaire, c’est mieux. <3

C’est notre rôle de faire peser la balance et de réfléchir aux conséquences de nos achats. Parce que, qu’on le veuille ou non, acheter est un acte militant, qui infirme ou confirme certaines pratiques agricoles et commerciales. Et il nous revient, en tant que consommateurs, de voir où l’on veut mener le monde, ce que l’on a envie de soutenir, ou de détruire, ce que l’on veut en faire dans un futur pas si lointain que ça. Et heureusement, certaines personnes ont imaginé des logos pour nous aider dans nos choix. Incomplets, certes, mais utiles, surtout si on en use en conscience et avec esprit critique.

Portez vous bien les amis. <3

PS : J’ai illustré cet article avec des photos de mes propres plantations, garanties 100% bio et fair. ;)

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